17.10.2023

Adopter l’Ecoféminisme : Mettre l’Accent sur une Economie Centrée sur la Vie

L’article souligne la nécessité d’une transition vers une économie centrée sur la vie qui adopte les principes de l’écoféminisme et donne la priorité à l’égalité des genres, à la justice sociale et à la durabilité environnementale.

Pouvons-nous créer une économie qui donne la priorité au bien-être de tous les êtres vivants et à la durabilité de notre planète ? Dans ce monde globalisé, il devient de plus en plus évident que nos cadres économiques actuels exigent une profonde transformation. La poursuite incessante d’une croissance sans fin et d’une richesse matérielle a laissé une trace de ressources naturelles exploitées, d’inégalités sociales accrues et de communautés vulnérables marginalisées.

Dans la région Moyen-Orient et Afrique du Nord (MENA), faire face à ces préoccupations nécessite de concevoir un cadre économique qui donne la priorité à la vie et au bien-être. Cela exige d’aller au-delà des notions traditionnelles de réussite économique et d’adopter les principes de l’écoféminisme. Ce dernier reconnait l’interdépendance des systèmes écologiques et sociaux tout en mettant l’accent sur la nécessité de l’égalité des genres, de la justice sociale et de la durabilité environnementale.

Traditionnellement, les cadres économiques ont accordé une grande importance à des mesures étroites telles que le Produit Intérieur Brut (PIB) et à l’accumulation matérielle. Ils sont considérés comme des repères de progrès. Cependant, cela ne parvient pas à répondre au bien-être des individus, des communautés et de la planète. Cela néglige également l’intersectionnalité entre les dimensions économiques, sociales et environnementales.

Pour résoudre ce problème, un changement d’orientation est nécessaire ; un changement qui place la vie et le bien-être au cœur des processus de prise de décision. C’est là que le concept d’une économie centrée sur la vie et le bien-être entre en jeu, car il souligne la nécessité de réévaluer nos priorités, de redéfinir la réussite économique et d’adopter une approche globale qui intègre les principes directeurs de l’écoféminisme.

Ecoféminisme et Economie Centrée sur la Vie

Les principes d’une économie centrée sur la vie s’accordent étroitement avec les principes de l’écoféminisme de plusieurs manières principales. Les deux cadres reconnaissent l’interdépendance des systèmes sociaux, économiques et écologiques ; ils plaident également pour une rupture avec les systèmes hiérarchiques et exploiteurs ; et ils donnent la priorité à l’entretien des relations avec la nature et les uns avec les autres.

Tout d’abord, l’écoféminisme et une économie centrée sur la vie donnent la priorité à la valeur et au respect de tous les êtres vivants, qu’ils soient humains ou non-humains. Ils remettent en question le paradigme dominant selon lequel la nature et les femmes sont considérés comme des objets à dominer et à exploiter à des fins de profit et de pouvoir. Ces deux cadres donnent la priorité au bien-être et à la durabilité des communautés et des écosystèmes plutôt qu’aux gains économiques à court terme.

De plus, l’écoféminisme et une économie centrée sur la vie préconisent des processus décentralisés et participatifs de prise de décision. Ils soulignent également l’importance de donner la parole aux groupes marginalisés et vulnérables, notamment les femmes et les communautés autochtones, qui ont traditionnellement été exclues des sphères de prise de décision.

Enfin, les deux cadres promeuvent des pratiques qui mettent l’accent sur la régénération, la réciprocité et la circularité. Ils appellent à une évolution vers des formes de production et de consommation plus durables et régénératrices qui fonctionnent en harmonie avec l’environnement naturel. Cela inclut la valorisation et la restauration des écosystèmes, la promotion d’une agriculture durable et l’adoption des principes de l’économie circulaire.

Indicateurs Alternatifs de Progrès

L’Indicateur de Progrès Véritable (IPV) et l’Indice du Bonheur National Brut du Bhoutan (IBN) remettent en question la focalisation étroite sur les indicateurs économiques comme le PIB, qui négligent souvent le bien-être des personnes et l’environnement. Les deux indicateurs donnent la priorité à la poursuite de la durabilité, de l’équité sociale et de l’équilibre écologique. Tous ces éléments sont au cœur de l’écoféminisme et d’une économie centrée sur la vie. Les sociétés peuvent réorienter leur attention vers des approches plus globales et inclusives du progrès et du bien-être si ces mesures alternatives sont intégrées.

L’IPV vise à évaluer le progrès économique et le bien-être en tenant compte des facteurs sociaux, économiques et environnementaux que le PIB ne parvient pas à capter. Il prend en compte des indicateurs tels que la répartition des revenus, la qualité de l’environnement, le travail bénévole et la valeur du travail domestique. En intégrant ces mesures plus larges, l’IPV concorde avec les principes de l’écoféminisme et d’une économie centrée sur la vie en reconnaissant l’interconnectivité des systèmes sociaux, économiques et écologiques. Il reconnait l’importance d’une répartition équitable des ressources, du bien-être des communautés et de la protection des écosystèmes naturels.

De la même manière, l’Indice IPV de Bhoutan mesure les progrès sur la base de principes tels que le développement durable, la conservation de l’environnement, la préservation de la culture et la bonne gouvernance, plutôt que de se concentrer uniquement sur la croissance économique. L’Indice IPV s’accorde avec l’écoféminisme dans la mesure où tous les deux valorisent le bien-être global des individus et des communautés – cela inclut leurs relations avec la nature et leur patrimoine culturel. Il reconnait également l’interdépendance entre le bien-être humain, la durabilité environnementale et la justice sociale, qui sont les principes fondamentaux d’une économie centrée sur la vie.

Changer de Focus : Appel à l’Action

Dans le paysage dynamique et en constante évolution de la région MENA, le rôle des jeunes dans la refonte des cadres économiques n’a jamais été aussi crucial. Les jeunes ont le pouvoir de conduire un changement d’orientation vers un avenir plus inclusif et durable.

Nous devons participer activement à la refonte des cadres économiques qui ont perpétué les inégalités et la dégradation de l’environnement. Cela commence par le plaidoyer ; par le fait d’utiliser nos voix pour sensibiliser et exiger un changement durable. Notre voix collective peut résonner partout et inspirer les autres. Mais le plaidoyer seul ne suffit pas. Nous devons également agir en nous joignant aux mouvements et organisations dirigés par des jeunes qui valorisent les principes de l’écoféminisme.

Nous avons besoin de politiques qui reconnaissent l’interdépendance des systèmes écologiques et sociaux tout en mettant l’accent sur la nécessité de l’égalité de la justice sociale, de la durabilité environnementale et de la répartition équitable des ressources. Nos revendications devraient faire écho aux principes de l’écoféminisme, en adoptant la valeur intrinsèque de la nature et la nécessité d’un équilibre harmonieux entre les activités humaines et la planète.

Shahd Almahameed est écoféministe et responsable du Programme de l’Action pour le Climat à Générations pour la Paix.

Les opinions exprimées dans cet article ne sont pas nécessairement celles de la Friedrich-Ebert-Stiftung.

Friedrich-Ebert-Stiftung

Le Bureau Genre et Féminisme

+961 1 202491
+961 1 338986
feminism.mena(at)fes.de

À propos de nous